Pouvez-vous présenter EDT ?
Patrick SCHULLER : « Notre métier depuis 30 ans cette année est d’aider les entreprises à digitaliser leurs échanges B2B avec leurs écosystèmes (fournisseurs, clients, transporteurs et logisticiens), avec des solutions de digitalisation multi-canal EDI, PDF intelligent, portails B2B collaboratifs, module de pilotage des flux et des relations partenaires. Et une offre de services : mise en place, déploiement, support.
Nous souhaitons ainsi permettre à nos clients de se concentrer sur leur métier de gestion de la supply chain logistique et financière. »
Que signifie digitaliser sa supply chain ?
PS : « On peut relever un paradoxe dans le sujet. En effet, la supply chain est c’est la chaîne d’approvisionnement des marchandises du fabricant vers le consommateur final en passant par les transporteurs, entrepôts, distributeurs. C’est donc un processus fondamentalement physique, de circulation de marchandises.
Si on parle de digitalisation de la supply chain, c’est que la supply chain aujourd’hui c’est non seulement la circulation des marchandises, mais aussi celle des flux d’informations de plus en plus nombreuses qui les accompagnent qui sont produits, traités, exploités dans la supply chain.
La supply chain est devenue, avec l’e-commerce mais aussi l’informatisation de la gestion des entreprises et des entrepôts (ERP, WMS, TMS…), et des échanges B2B, un processus informationnel, une supply chain d’information échangées d’un bout à l’autre de la chaîne pour permettre sa gestion.
De plus, il y a un autre point qui explique ce paradoxe : la convergence entre la supply chain physique et la supply chain data, avec le développement de la capture de l’information sur les matériels et marchandises : RFID (étiquettes à radio fréquence), codes-barres ou data matrix, et bien sûr l’IoT, l’Internet des objets.
Digitaliser la supply chain, c’est à la fois dématérialisation des supports échangés entre les partenaires commerciaux, et l’interconnexion des systèmes entre eux dans un contexte écosystémique avec beaucoup d’acteurs et beaucoup de données. »
Pourquoi les entreprises doivent-elles amorcer cette digitalisation de la supply chain ?
PS : « Encore un paradoxe dans le mot « amorcer » !
La digitalisation des flux B2B qui couvre une partie importante de la supply chain, en particulier l’EDI, existe depuis les années 90 en France. Avec des entreprises qui ont déjà une majorité de leurs échanges qui sont électroniques. On peut citer les exemples de la Grande Distribution ou de l’Automobile.
Le bénéfice recherché était initialement avant tout les gains de productivité liés à l’automatisation des processus induits de gestion des approvisionnements.
Aujourd’hui, la digitalisation concerne tous les secteurs d’activité, toutes les tailles d’entreprises.
La digitalisation devient un must pour rester dans la course, pour rester compétitif en termes de coût et de service.
En outre, avec le développement du e-commerce, il faut satisfaire les clients finaux qui demandent réactivité et traçabilité. Le consommateur est au sommet de la chaîne logistique et il faut le servir de ce qu’il veut, où il veut, quand il veut. »
Quels sont les enjeux de cette transformation ?
PS : « Ils sont nombreux ! Tout d’abord il faut un processus d’approvisionnement rapide et flux tendus pour arriver à concilier à la fois :
- le meilleur service clients, en particulier arriver à fournir la marchandise rapidement;
- le stock le plus bas possible pour des raisons d’amélioration du BFR.
En particulier, dans le cas du développement du e-commerce en flux tendu type « marketplace Amazon ». Le Dropshipping (approvisionnement déclenché par commande du client final et livré directement depuis le fournisseur) entraîne plus de références (parfois plus de 100 000), plus de commandes, une baisse du panier. La digitalisation est obligatoire.
On est passé du « Make to Stock » au « Make to Order ». Ce n’est plus le même modèle.
En second lieu, il faut automatiser le processus de gestion de la supply chain pour le rendre plus efficace, plus productif.
Il faut donc digitaliser le processus B2B de la commande au paiement en passant par la livraison, l’avis de transport, la facture, etc…
Pour y arriver, ce n’est pas simple. C’est un chantier qu’il faut préparer en amont à plusieurs niveaux :
- Qualité des données dans le Système d’information, par exemple il faut avoir des référentiels produits-fournisseurs propres.
- Intégration des S.I de la supply chain qui sont par nature différents : ERP, TMS-WMS, les S.I des partenaires, l’EDI, les portails collaboratifs…
- Embarquement des partenaires commerciaux dans le basculement aux échanges électroniques
Enfin, il faut garder la maîtrise de sa digitalisation, des flux et des données : « track and trace »
- Traçabilité des produits (tracing) pour pouvoir remonter la piste en cas de problème sur un produit qui peut causer un problème de santé publique en cas d’empoisonnement
- Traçabilité des flux (tracking) : plus on digitalise plus l’enjeu de contrôler cette digitalisation et donc les millions de flux électroniques qui transitent devient un enjeu majeur
En outre, le sujet de la piste d’audit de gestion a été renforcé par la réglementation fiscale sur la dématérialisation des factures qui exige (si le mode « piste d’audit » est retenu) de prouver la conformité de la facture en démontrant son lien avec la commande, la livraison. Ce qui encourage la digitalisation de tout le processus P2P (« Purchase to Pay »).
Enfin, pour pouvoir utiliser le potentiel des nouvelles technologies de Big Data et d’Intelligence Artificielle, notamment dans leur capacité à mettre en place des supply chain autonomes et prédictives, la digitalisation intégrale est un préalable indispensable. »
Où en sont les entreprises sur le sujet ?
PS : « Selon une étude Cap Gemini 2018, plus de 80% des entreprises ne parviennent pas à déployer un projet de digitalisation à grande échelle.
En outre, pour que le taux de dématérialisation se transforme en taux d’automatisation de la supply chain, cela suppose non seulement la dématérialisation des flux B2B (commande, bon de livraison, facture, avis de transport…) mais aussi un fort taux d’intégration automatique et donc un travail sur la qualité des données et des référentiels, des outils de rapprochement automatique et de workflow.
Beaucoup d’entreprises ont initié un projet de digitalisation, soit pro activement soit en réaction aux demandes de ses clients. Mais peu de projets sont optimisés en termes de déploiement des partenaires et de taux d’automatisation.
En outre, la digitalisation reste quand même un sujet de grandes entreprises et leurs fournisseurs PME, leurs logisticiens.
Le taux de TPE-PME embarqué reste faible, car les bénéfices sont moins évidents pour eux.
A ce titre, il faut noter que l’action des pouvoirs publics, en particulier la Directive UE 2014, matérialisée en France par le projet CHORUS PRO a été très impactant en obligeant les fournisseurs des Services Publics à dématérialiser leurs factures. »
Quels outils proposez-vous pour la digitalisation de la supply chain ?
PS : « Notre métier est la digitalisation des échanges B2B. Pour cela nous proposons une plateforme de traitement pour les communications, les contrôles, les transformations de données, qui permet en outre :
- L’acquisition multi-canal des données sur tout type de flux structuré (EDI) et non structuré (PDF), entrant ou sortant de l’entreprise.
- L’accès à un réseau ouvert, interconnecté avec les autres réseaux principaux
- Un portail collaboratif B2B et de supervision des flux de bout en bout
- La dématérialisation fiscale et l’archivage légal des factures
Ainsi que tous les services nécessaires de mise en place, de déploiement, et de support qui permettent à nos clients de se concentrer sur leur métier.
Tout comme on fait appel à des spécialistes pour la gestion des entrepôts, il faut faire confiance aux experts de la gestion des données de la supply chain, tels qu’EDT. »
Outre les outils et les solutions, quelle culture du changement est-elle nécessaire ?
PS : « La digitalisation de la supply chain suppose un fonctionnement très transversal, un décloisonnement des services, permettant une transmission rapide des informations, comme par exemple entre le Marketing (infos marché) et le Supply (commandes).
Les directions métier, la DSI et la DG doivent être impliquées.
Il faut aussi penser à embarquer ses partenaires, fournisseurs, clients, transporteurs et avoir une approche pédagogique et différenciée.
Le succès de la digitalisation de la supply chain passe par le déploiement avec les tiers. Dès lors, l’interopérabilité des solutions est clé et nécessite de revoir les processus internes de façon à les normaliser et les rendre compatibles avec les processus des tiers. Le risque premier est de tenter d’imposer les conséquences de ses processus internes aux tiers.
Par exemple, imposer des formats de fichiers qui sont compliqués (contenu, format) est un frein. »
En conclusion ?
PS : « En conclusion, la digitalisation de la supply chain, c’est : le client est roi, la donnée est reine.
Le client final, au sommet de la supply chain, exige un tel niveau de disponibilité et de réactivité que la digitalisation est indispensable pour être dans la course.
La donnée de gestion, produite, traitée et exploitée par la digitalisation, constitue l’enjeu majeur d’une supply chain digitale efficace et fluide, en relation avec les partenaires commerciaux et logistiques.
A l’heure où on parle de supply chain 4.0 connectée et autonome, grâce à la combinaison de l’IoT, de la Blockchain, de l’IA, il est important de rappeler que pour y arriver, il faut déjà poser les fondations digitales :
- Digitaliser l’ensemble des flux de la supply chain et donc embarquer l’ensemble des partenaires
- Arriver à interconnecter/interopérer son écosystème externe et son SI : plateformes cloud, interopérabilité entre plateformes, normalisation des échanges…
Pour faire en sorte que les données de la supply chain soient exploitables et permettent d’atteindre l’excellence opérationnelle (automatisation, fluidité, prévision…).
- Sans oublier le contrôle et la supervision de l’ensemble de la chaîne digitale
C’est la vision de notre métier chez EDT. »